Pourquoi écrit-on un livre ?

Comment écrit-on un livre ?

Le propos de Laurent Binet dans HHhH est clair : il souhaite rendre hommage à la mémoire de son père et à celle des héros de l’attentat commis à Prague en 1942 contre un haut dignitaire nazi, Reinhard Heydrich.

Mais comment raconter de nos jours une histoire qui se déroule durant la seconde guerre mondiale ?

Aussi intéressant que soit le sujet, son contexte et ses protagonistes, écrire un document, un livre d’histoire ne ferait qu’ajouter un livre de plus pour un lectorat restreint, pour des spécialistes.

Ecrire un roman serait certainement plus intéressant, plus actuel, mais comment écrire un roman sur des Héros de l’Histoire ?

Comment leur rendre un réel hommage sans pervertir, ni leur action, ni leur humanité, derrière des mots et des faits inventés ?

Comment raconter l’horreur de la guerre et de la « Solution Finale », parler de l’extermination volontaire de millions de juifs, sans amoindrir les actes ou les paroles derrière les mots d’un roman ?

C’est pourtant à cela que s’attelle Laurent Binet : ni roman, ni essai, une sorte d’ovni intermédiaire qui raconte le livre en train de s’écrire, l’écrivain en train de construire son projet …

Mais ce n’est pas un roman sur l’écriture d’un livre sur la guerre. C’est beaucoup plus que cela.

D’abord parce que l’Histoire est là. On peut y redécouvrir la montée en puissance du nazisme, la vie « presque » quotidienne de ces hommes et de ses femmes qui pouvaient, tuer, décimer par milliers, par millions d’autres êtres humains, d’autres êtres qui ne considéraient pas comme humains.

De la construction théorique (si l’on peut dire) du nazisme aux actes de barbarie, des actes de guerre aux actes politiques, on redécouvre une époque dans toute sa cruauté et sa réalité.

Mais le livre est aussi une leçon de littérature, sur les questions à se poser avant d’écrire, par ses références aux auteurs qui ont traité du même sujet depuis 70 ans.

Malgré l’horreur du sujet, et elle est réelle, le livre reste, tout du long d’une légèreté et qui permettra à chacun d’entrer dans un sujet que l’on croit connaître mais dont il faut redécouvrir les éléments princeps.

PS : L’auteur cite Les Bienveillantes de Jonathan Littell et s’interroge sur la nécessité de continuer son projet. La lecture de HHhH m’a donné envie de lire le Littell. On y reviendra.

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